Le transfert inter-dimensionnel le frigorifia pendant quelques secondes, puis il émergea de l'autre coté. Aussitôt la sensation désagréable cessa, mais le froid en lui-même ne semblait pas vouloir partir. Pendant un bref instant, l'inquiétude le saisit, puis il regarda autour de lui et fut rassuré. Un paysage d'un blanc immaculé s'offrait à ses yeux : c'était l'hiver ici. Le froid qui le transperçait n'était donc pas du à une défaillance du transfert, mais tout simplement à la température ambiante. Rassuré, il regarda à nouveau autour de lui pour prendre ses repères. Un petit chemin serpentait entre la végétation enneigée, et disparaissait dans la montagne.
- Je suis bien arrivé. C'est déjà ça.
Sans se presser, mais sans non plus perdre de temps, il emprunta le chemin qui s'ouvrait à lui. Malgré le froid et la neige, il faisait un temps splendide. Un ciel d'un bleu presque surnaturel était visible au dessus de lui. Tout était paisible, et il ne détectait aucun danger, juste de temps à autre un animal : oiseau, renard des neiges ou autre, avec ses dons de magie shamanique. L'endroit avait quelque chose de paradisiaque, ce qui était normal vu sa vraie nature.
Environ un quart d'heure après avoir émergé de son transfert au bord du chemin, il arriva en vue d'une maison. Elle était comme on lui avait décrite : construite au-dessus d'une cascade, et d'une taille quasiment impossible à définir. Bien qu'on lui eut déconseillé de le faire, il tenta de suivre ses lignes architecturales pour en appréhender la structure globale. Peine perdue, son regard ne cessait de se perdre dans les lignes, les angles et les courbes de la maison. Elle avait été construite avec une architecture hyperdimensionnelle, et changeait sans cesse d'aspect selon le point de vue de l'observateur. On aurait dit un de ces dessins d'Escher qui provoquait émerveillement ou migraine, voire les deux en même temps. Une bonne douzaine de styles architecturaux se mélangeaient harmonieusement, ce qui aurait été très certainement impossible avec cette géométrie plus ordinaire.
Arrivé devant la porte, il alla frapper quand une jeune fille, d'une beauté saisissante, lui ouvrit, comme il elle l'attendait. Elle avait l'air complètement inoffensive, presque fragile. Mais il savait qu'il ne devait pas s'y fier. Les jeunes filles qui étaient formées ici étaient considérées comme les espionnes et les assassins les plus compétentes et dangereuses de la Galaxie. Il ne fit donc pas le moindre geste qui aurait put être considéré comme une menace.
- Je suis venu voir le maître de cette maison, expliqua-t-il. Je me nomme...
- Je sais. Je vais voir s'il peut vous recevoir. En attendant, vous pouvez attendre dans ce petit salon, fit-elle en indiquant une porte ouverte.
- Bien.
Il se déchaussa avant de quitter le vestibule, puis passa dans la pièce que lui avait indiqué la jeune fille. Un feu flambait joyeusement dans une des cheminées, et il alla se réchauffer devant. On ne l'avait pas prévenu qu'il ferait froid ici, aussi n'avait-il même pas pris de manteau. Sans son métabolisme génétiquement modifié, il aurait été à moitié frigorifié en arrivant à la maison. Mais il avait simplement un peu froid et le feu qui crépitait le réchauffa très vite.
- Il est prêt à vous recevoir. Suivez-moi, s'il vous plaît.
Il la suivit donc dans le labyrinthe de la maison. Par pur réflexe professionnel, il essaya de tracer un plan des couloirs qu'il empruntait. Mais même avec ses implants nanoniques, il fut vite totalement perdu. Il se demanda comment les occupants de la maison faisaient pour s'y retrouver. À ce qu'il en savait, c'était des humains parfaitement normaux, à l'exception de celui qu'il venait voir, bien sur. Ils arrivèrent enfin dans une pièce de taille moyenne, avec de grandes fenêtres donnant sur la forêt. Un homme, habillé d'un kimono de soie, y était assis en tailleur, devant un table basse.
- Votre visiteur, Goshujin-sama, fit la jeune fille avant de se retirer.
- C'est bon... Bienvenue dans ma modeste demeure, visiteur.
- Merci de me recevoir, répondit-il.
Le maître de maison lui fit signe de s'asseoir, et il sentit son regard se porter sur lui. Il se demanda un instant quel effet faisait son apparition sur les pensées de son hôte. Son costume démodé de plusieurs siècles par exemple. Encore que, isolé et excentrique comme il l'était, il ne s'en apercevait peut-être même pas.
- Je dois dire que je suis fort surpris de vous voir arriver chez moi. Normalement, un simple mortel ne peut accéder à ce petit Univers privé. Fut-il un Chevalier Céleste. Je suis curieux de connaître votre histoire, et la raison de votre venue ici.
- Vous n'avez pourtant pas tenté de m'arrêter entre le moment ou je suis apparu ici et celui ou je suis arrivé à la porte de votre maison.
- C'est parce que vous n'avez jamais montré la moindre trace d'hostilité. Je vous rassure, si un mortel mal-intentionné réussissaient à s'introduire dans cet Univers, il serait mort avant d'avoir pu comprendre ce qui se passait. Dans le meilleur des cas pour lui. Vous même, si vous décidiez soudainement d'avoir de mauvaises intentions, tout Chevalier Céleste que vous êtes, vous ne feriez pas le poids.
- Je ne peux pas dire que je suis étonné de vous entendre dire ceci. Mais rassurez-vous, mes intentions en venant ici sont parfaitement honorables.
- Je suppose que vous allez maintenant m'expliquer la raison de votre venue ici.
- En effet. Je vais cependant commencer par me présenter, même si la jeune fille qui m'a guidé semblait savoir qui j'étais. Je suis le Chevalier Céleste Ulyk de Sestriane.
Le maigre de maison haussa un sourcil devant cette déclaration.
- C'est donc bien ce que je pensait en voyant votre visage et le style de vos vêtements. Mais je dois m'avouer être surpris. N'êtes-vous donc pas mort en 2345 ? Les nombreuses statues à votre honneur éparpillés dans toute la Galaxie mentent-elles ? Sans compter les livres d'histoires.
- Non, ces informations sont exactes. Moi-même je suis fort surpris de me retrouver vivant. Et encore plus d'être devenu un héros de l'Histoire au cours des sept cent ans qui ont suivi ce regrettable jour.
- Je vois. Encore une facétie de La Déesse, je suppose.
- Oui, elle a semble-t-il décidé que j'étais le seul à pouvoir mener cette mission. Pourtant je ne crois pas être si différents des millions de Chevalier Célestes qui se sont succédés depuis que vous avez fondé cette noble institution.
- Sans doute est-ce du au fait que vous êtes mort jeune, au sommet de votre puissance, et à un moment clé de notre Histoire.
- Sans doute. Toujours est-il que j'ai pour mission de vous arracher à cette paisible retraite. Une Guerre Sainte se prépare.
Cette fois, ce ne fut pas par un haussement de sourcil, mais par un rire franc qu'il réagit. Il semblait avoir trouvé la déclaration de Ulyk extrêmement grotesque de par son improbabilité.
- Une Guerre Sainte ? Et contre qui ? La Galaxie est unifiée. Et si je ne m'abuse, les Dieux interdisent toujours à Notre Déesse de propager sa parole en dehors de celle-ci.
- Justement. L'ennemi n'est pas de noter Galaxie.
- Nous sommes attaqués ? Dans ce cas-là, pourquoi donc ressusciter les morts et arracher les vétérans à leur retraite bien mérité ? N'avons nous pas un glorieux Empire prospère et puissant, regorgeant de Chevalier Célestes pour défendre aussi bien ses valeurs que son intégrité ?
- Le soupçon d'ironie dans vos paroles vous trahit. Vous savez aussi bien que moi que la structure que nous avons mis en place, vous au début, et moi à son milieu, s'est lentement érodé. Elle n'est plus que l'ombre d'elle même aujourd'hui. Pour le moment, la guerre se résume à des escarmouches sur les frontières. Mais le jour ou les choses sérieuses vont commencer, il est fort probable que tout ceci va s'effondrer, à la grande surprise de tous, Citoyens comme Nobles.
- Je sais, je sais, inutile de me donner tant d'explications. Une chose m'intéresse vraiment?. Pourquoi maintenant ? La situation n'est pas nouvelle. Quel évènement à poussé Notre Déesse à faire se mouvoir ses pions ? En particulier, moi, qu'on surnomme l'Hérétique...
- C'est fort simple. Le Petit Nuage de Magellan a été envahi avec succès.
Pour la première fois en plus 600 ans, l'Empire Galactique avait perdu une partie de son territoire. L'attaque avait été soudaine, brutale, et avait pris tout les défenseurs au dépourvu. Le Petit Nuage de Magellan était la région la plus reculée de l'empire, isolée mais paisible et sans histoire. Ses faibles défenses avaient été annihilés, les militaires, les Nobles et les Chevaliers Célestes massacrés, les citoyens réduits en esclavage et convertis de force. C'était sans précédent.
- Je suis étonné de voir aussi peu de réaction au sein de la population, dit l'Hérétique. J'avais imaginé les voir choqués et avides de revanche. Ils ont plutôt l'air apathique.
- Tout porte à croire qu'ils font un blocage. Ils se rattrapent au fait que l'invasion a été une attaque surprise et massive. Ils pensent encore que les envahisseurs ne peuvent aller plus loin. Mais à la prochaine défaite ils comprendront la gravité de la situation. Enfin, j'espère...
Les deux hommes avaient quitté la maison de l'Hérétique pour rejoindre Thranh, une riche colonie xyvagagarienne, qui formait un centre économique et culturel assez important dans son secteur de la Galaxie. Les rues étaient calmes, la population locale semblait vaquer à ses occupations quotidiennes sans se préoccuper qu'une guerre à l'échelle galactique venait de commencer.
- C'est ici que l'on va.
- Un musée ? Je suis curieux de voir ce que vous venez chercher ici.
L'Hérétique avait rapidement accepté de suivre la mission de la Déesse Ulyk était venu lui transmettre. Il avait donc confiée sa demeure à ses élèves et avait suivi le Chevalier Céleste, mais il avait d'abord demandé à venir ici pour récupérer « une petite babiole ». Ils entrèrent donc dans le musée et se dirigèrent vers la section d'histoire militaire. Là, sans surprise, une salle était consacré aux Chevaliers Célestes les plus fameux. Au centre de la pièce se trouvait le clou de l'exposition. C'était un cylindre aux formes sculptées complexes, d'environ 45cm de long. Il était noir, incrusté d'arabesques d'argent et de quelques pierres précieuses. Deux petits ergots perpendiculaires à son grand axe en dépassaient sur le coté, à proximité de chaque extrémité. Il était posé sur un portique en bois laqué, dans une vitrine haute sécurité. Il existait sept musées à travers la Galaxie qui affirmait posséder l'original de cet artefact précieux.
- Non ! Ne me dites pas que vous êtes venus chercher ça !
- Si. C'est le symbole de ce que j'ai été et de ce que je fois redevenir. Mon sabre de technomage.
- Mais quand même... Maintenant ? En plein jour ?
- Pourquoi pas ?
- Bon... Au moins, désormais, ils sauront quel musée a, ou plutôt avait, l'original.
- En effet.
Sans hésiter, il s'approcha de la vitrine, et tendit la main vers elle. La vitre incassable explosa en mille morceaux. Un des gardes, jusque-là sommeillant à moitié, savourant la routine d'une après-midi tranquille pour digérer son repas de midi, sursauta et voulut s'approcher pour s'occuper de ce voleur invraisemblablement audacieux. Mais la stupeur le paralysa sur place. Aucun des scellés magiques ne le stoppa, et pire, le sabre quitta son support pour voler vers la main du voleur. Non... Ce n'était quand même pas lui en personne... C'était impossible... Il se figea sur place d'incompréhension et les deux hommes quittèrent tranquillement la petite salle.
- Ainsi, il est donc vrai que vous avez renoncé à votre sabre quand vous avez quitté le service de la Déesse.
- Non, tout ce qui est raconté dans les livres d'histoires n'est qu'un légende. La vérité ait que j'ai du le laisser derrière moi quand j'ai du quitter précipitamment le harem de l'ArchiSultan Von Entekreuz. Il est resté pendant des siècles dans les coffres-forts de cette noble famille. Ils avaient hélas le soutien de plusieurs de mes ennemis au sein des Anges Majeurs, ce qui m'a dissuadé de le récupérer immédiatement. Et une fois qu'il a quitté ces coffres, j'étais passé à autre chose. Je n'en avait tout simplement pas besoin, jusqu'à aujourd'hui.
- Ça casse un peu le mythe...
- Désolé.
Les rares visiteurs du musée en cette après-midi de semaine avaient tous pris leurs jambes à leur cou, aussi ce furent des salles désertes que les deux hommes traversèrent après avoir récupéré le sabre.
Cependant, alors qui arrivaient dans le hall d'entrée, un homme en uniforme les attendaient, un sabre dégainé devant lui. Il avait l'air jeune et une expression prétentieuse de triomphe était visible sur son visage. Quelle chance de se trouver ici à ce moment précis. Il allait devenir un héros sans même l'avoir demandé.
- Oser vous emparer de cette précieuse relique... Au nom de la Déesse, je vais devoir vous tuer !
- Silence, blanc-bec. Tu devrais avoir compris qui je suis !
Et pour écarter tout doute, il activa son sabre. Un des ergots, celui situé près de l'extrémité supérieur, sortit un peu plus du sabre avec un petit clic mécanique. Une lame d'énergie lumineuse en sortit, se déployant sur un peu plus d'un mètre de longueur.
- Sauf à être un imbécile, tu sais très bien que seul son propriétaire légitime peut activer un sabre de technomage.
- C'est... impossible... Il n'y a même plus de technomages encore en vie...
Et il tomba dans les pommes.
- Décidément, vous aviez raison. Les Chevalier Célestes de cette époque ne sont que des incapables en comparaison de ceux de nos époques.
Maintenant que Milvus avait récupéré son sabre, lui et Ulyk pouvait se consacrer à leur mission proprement dite : reconstituer l'équipe des Fondateurs.
- Vous n'avez pas peur d'être un peu voyant, en vous baladant comme ça avec un sabre de technomage à la ceinture ?
- Non, j'ai mis un champ de déformation de la réalité autour de nous. Personne ne nous remarquera.
- Sage précaution. Mais sinon, je ne comprends toujours pas pourquoi vous vous attachez autant à ce nom ridicule de « ChouChouLandais ».
- C'est ainsi que l'on se nommait. Sans le ChouChou Suprême, rien se serait arrivé. Ce n'est que bien après que nous ayons cessé d'avoir un rôle important que le terme « Fondateur » l'a remplacé. Ces fichus historiens, toujours à améliorer le passé à leur sauce.
- Je vois... Qui allons-nous chercher en premier ? dit Ulyk en sortant sa liste, préparé par la Déesse. Tout le monde n'a pas été localisé.
- Justement, je pensait commencer par quelqu'un qui n'est sur la liste.
- Il est sur cette planète ?
- Pas exactement. Comment dire... Il est partout et nul part à la fois.
Milvus conduisait Ulyk vers la vielle ville, un labyrinthe de ruelles pittoresques s'entrelaçant sur une colline, au sommet de laquelle se trouvait un jardin, là où, jadis, se trouvait un château. Ils trouvèrent la ruelle la plus sombre et la plus tortueuse, et s'y arrêtèrent. Milvus fit signe à Ulyk de fixer un mur, et il traça des runes magiques sur celui-ci. Puis il tapa des mains et les runes disparurent dans un éclat de poussière lumineuse.
- On peut se retourner désormais.
Une boutique à moiti délabré se trouvait maintenant située face mur ou les runes avaient étés tracées. Ulyk aurait pur jurée qu'elle ne se trouvait pas là quelques minutes auparavant. La porte n'était pas fermée à clé et ils entrèrent sans difficulté. Ulyk vit que c'était une librairie. De partout on pouvait voir des livres, de tous ages, de tous formats et probablement de toute langue. Une épaisse couche de poussière recouvrait la plus grande partie de la boutique. Elle se prolongeait par de nombreux rayonnages dans toutes les directions. Ulyk essaya de les compter et attrapa vite la même migraine que dans la maison de Milvus.
- Attention. L'espace B est autrement plus dangereux que l'architecture hyperspatiale de ma maison. Ne me quittez pas d'une semelle.
- OK.
Milvus dégaina son sabre, et le tenant à l'envers, il fit jaillir à moitié l'ergot inférieur. Une lumière verte-bleu apparu au bout de celui-ci. Milvus tourna sur lui-même, et l'intensité de la lumière varia. Utilisant ainsi son sabre comme une boussole, il se dirigea dans le labyrinthe, prenant bien garde à toujours garder la lumière la plus intense possible. Une bonne dizaine de minutes plus tard, ils arrivèrent dans une petite pièce basse. Le sol était recouvert de quelques centimètres d'eau et de la vapeur d'azote liquide formait un léger brouillard. Il n'y avait presque pas de lumière, à l'exception de celle projetée par une douzaine d'écran d'ordinateur. Un homme était assis devant, son corps recouvert d'électrodes et de capteurs divers. Il s'interrompit au moment ou Milvus et Ulyk entrèrent dans la pièce.
- Tiens tiens tiens... Ça faisait longtemps, Mimil.
- Ouais Calim.
- Que me vaut d'être dérangé dans mon repère ?
- Une Guerre Sainte. On est appelés à la rescousse.
- Tu te fiches de moi. Ils sont désespérés à ce point, en haut, pour faire appel à ceux qui les ont faits le plus chier ?
- Ouais, on dirait. Comme d'habitude, les serviteurs les plus fidèles sont devenus une bande d'abrutis.
- M'étonne pas. Imbéciles de religieux. Qu'est ce qui te fait croire que je vais accepter ?
- J'imagine pas que tu puisses rater une occasion de foutre le bordel dans une guerre de religion.
- Touché...
L'étape suivante était une charmante planète agricole, avec une faible niveau de technologie, mais une magie omniprésente. L'été battait son plein dans la région où ils arrivèrent, et la nature exubérante les accueillit avec générosité.
- Sympathique, ce coin, dit Milvus.
- Oui, approuva Ulyk. Hélas, une telle planète sera la première cible des envahisseurs. Pour eux, toute magie effectuée par quelqu'un qui n'est pas un prêtre de leur Dieu est un hérétique à massacrer. Tout ça pour que leur clergé ait le monopole des miracles...
- Il ne doivent pas aimer la technomagie alors... fit Calimsha en grimaçant.
- C'est le cas de le dire. Mais bon, de ce coté ils auront du mal à se mettre quelque chose sous la dent.
- J'ai remarqué ça, dit Milvus. C'est incroyable que le niveau des Chevaliers Célestes ait baissé à ce point.
- Vous savez ce que c'est. Chaque année on rogne un peu sur les programmes scolaires, et à la fin, on a une population de plus en plus ignorante. Que ce phénomène atteigne même les élites de la société montre à quel point notre Galaxie est dans la merde. Mais le pire n'est pas là...
- Ah bon ? Il est où alors ?
- L'Empire était basé sur un subtile équilibre entre la démocratie des Citoyens, axé vers la liberté, et la méritocratie des Nobles et des Aristocrates, axé vers le sens du devoir. Et les Chevaliers Célestes dans un coin pour surveiller tout le monde...
- Oui ça on sait, on a quand même aidé le système à se mettre en place, grogna Calimsha. Non que j'ai été convaincu qu'il marcherait. Mais bon, fallait bien quelque chose.
- Oui... Le problème ait qu'une fois la phase de construction terminée, toute la structure s'est très lentement érodée. Tant que la corruption ne dépassait pas un certain seuil, ça allait encore. Les gens étaient honnêtes tout simplement parce que tout le monde l'était... Sociologiquement, on étaot dans un cercle vertueux qui s'autoentretenait.
- ...mais une fois le seuil franchi, l'équilibre était rompu. C'est ça, hein?
- Oui. Et au lieu d'avoir un système harmonieux, avec une importante méritocratie et un brassage social adéquat, on a eu une structure rigide, trop hiérarchisé et avec des incapables prétentieux au pouvoir. Tout en conservant des élus locaux corrompus et démagogues. C'était désormais un cercle vicieux.
- C'est beau ça, réussir à avoir à la fois les inconvénients d'une démocratie et d'une dictature, ricana Calimsha.
- Il est toujours aussi cynique ?
- Oh non, là il est dans un bon jour...
Cependant, les trois voyageurs étaient arrivés devant une charmante petite chaumière. Une elfette fluette étaient dans le jardin, en train de planter des fleurs.
- C'est elle, expliqua Ulyk.
- Pourquoi ne suis-je pas étonné ? fit Milvus.
Il toqua à la porte du jardin et l'elfette vint les accueillir.
- Vous êtes bien nommée Yleyne ne'l Aster ?
- Oui, répondit l'elfette en souriant, ses oreille se redressant.
- Je sais que ça va vous surprendre, expliqua Milvus, mais vous êtes la réincarnation d'un de nos amis. Nous venons donc vous proposer de nous joindre à notre quête.
- Une quête Monseigneur ? Mais je n'ai point le désir de m'en aller à l'aventure. Je me dois de décliner une telle proposition.
- Permettez-moi d'insister. Si vous pouviez au moins vous soumettre à une séance d'hypnose régressive pour retrouver vos souvenirs. Vous pourriez prendre une décision en toute connaissance de cause.
- Désolé mais c'est non. Veuillez quittez mon jardin !
- Elle ne nous croit pas, on dirait, soupira Ulyk.
- Dans ce cas, fit Calimsha. Tu vas pas faire chier longtemps, Gougoule, on t'embarque de force. On a une Galaxie à sauver, merde.
- IIIiiiiiiikkkk ! fit l'elfette devant cette tentative de kidnapping. CHAOS WAVE !!!
Et elle s'enfuit en sautant par dessus la haie de son jardin.
- Merde, elle a lancé un sort sur Calim à bout portant !
- J'ai comme l'impression que le niveau des elfettes a pas baissé au cours des siècles, fit Calimsha en crachant quelques dents. Elle m'a surprise, la salope.
- Que veux-tu, faut croire qu'elle sont moins sensibles à la décadence que les Chevaliers Célestes.
- Si on lui courait après au lieu de discourir ? proposa Ulyk.
Ils découvrirent bien vite que l'elfette s'était réfugié dans le temple du village, dédié au Gecko. C'était même apparemment une prêtresse à temps partiel.
- Et merde, c'est réservé aux femmes. On peut pas rentrer.
- Aucun problème, fit Milvus. Ça faisait longtemps que j'ai pas eu l'occasion d'user de certains de mes avantages d'Ange Majeur.
Et en quelque seconde, sa silhouette devint floue, puis se refocalisa dans une forme indéniablement féminine.
- À tout de suite.
Et il disparut dans le temple du Gecko.
- Merde, j'ai toujours cru que c'était une légende, cette histoire.
- Bien sur que non...
Calimsha et Ulyk s'assirent donc sur une grande pierre au bord du chemin, attendant que Milvus revienne avec la réincarnation d'Ori la goule. Ils n'eurent pas à attendre longtemps. Moins de dix minutes après que Milvus les eut quitté, une explosion secoua le temple, et un pan de mur s'écroula dans le jardin.
- Ah... Je crois qu'il a trouvé notre elfette.
Quelque secondes plus tard, un Milvus courant à toute allure, et portant une elfette assommé sur son épaule, passa devant eux.
- Pas le temps de vous expliquer. Suivez-moi !
La foule était déjà nombreuse quand Tarp arriva dans le grand terrain vague où devait se dérouler le méga-concert gratuit de musique Glock. Il mit près d'une demi-heure pour arriver assez près de la scène pour apercevoir quelque chose. Avisant les mines peu avenantes des spectateurs mieux placés, il décida s'en rester là. Pas la peine d'aller plus loin si c'était pour repartir les pieds devants. Et de toute façon ça allait bientôt commencer.
Les groupes s'enchaînaient sans relâche, chacun tentant de faire rugir sa musique plus fort que les précédents. La musique Glock était caractérisé par le fait que des armes à feu étaient utilisées comme instruments de musique. Bien entendu, un champ de force permettait aux musiciens de tirer dans tous les sens sans toucher la foule. Cela faisait 30 ans que le mouvement se répandait dans l'Empire et ça n'était pas près de s'arrêter. On avait pas vu tel aréopage de stars galactiques de la musique depuis 300 ans ! Mais la plus grande de toute allait rentrer en scène. La foule commençait à scander son nom, mais aussi à s'inquiéter. Il aurait du arriver il y a déjà quelques minutes, mais il n'y avait toujours pas de signe de lui. Tout d'un coup, sans prévenir, une énorme Bentley débarqua la scène en crevant l'écran géant du fond. Projetant des étincelles, elle atterrit sur la scène, les roues en feu laissant un sillage de désolation derrière elles. La foule était devenu hystérique, scandant le nom de leur idole :
- White Tea ! White Tea ! White Tea ! White Tea !
La star sortit de sa voiture, saluant la foule avec de grands gestes, les yeux invisibles derrières ses lunettes de soleil. Sans plus attendre, il prit sa hache-mitraillette-guitare qu'il portait dans son dos et commença un solo dément qui fit vibrer toute l'assemblée. Puis le reste du groupe arriva pour l'accompagner, et plusieurs morceau s'enchaînèrent, dont une bonne dose d'inédits. C'était décidément une soirée exceptionnelle. Mais Tarp n'avait encore rien vu. Il remarqua soudain un petit groupe qui montaient sur scène. Ce qui était fort étrange, vu que la sécurité aurait du empêcher tout fan un peu trop enthousiaste de monter sur scène. Entre autre pour éviter de se faire tuer par une balle perdue. Des invités spéciaux ? Mais Tarp connaissait tous les groupes de Glock dignes de monter sur scène avec White Tea, et ces quatre-là ne lui disait strictement rien. D'ailleurs il n'avait pas d'instruments. Il vit un mec avec un faux sabre de technomage à la ceinture, un autre tout habillé de noir, une elfette et un mec habillé en Chevalier Céleste d'il y a 700 ans. Plus hétéroclites tu meurs. Qui qu'ils soient, ils avaient l'air soit sérieusement à la masse, soit un peu trop avant-gardistes.
White Tea s'arrêta de jouer tout net en les voyant. Personne ne rata une miette de tout ceci, vu que l'écran géant (promptement réparé) montrait son visage en gros plan. Il avait l'air surpris, mais de façon agréable : il souriait de toutes ces dents.
- Salut les gars ! Je vous attendait pas ce soir.
- Tu sais qui on est ? Tu te souviens ? fit un des nouveau-venu.
Voilà qui était étrange. Il était normal qu'il puisse entendre White Tea, mais le nouveau venu ? Où était son micro ? Sur lui ?
- Mais bien sur ! Tu crois qu'on devient la plus grande star de Glock de la Galaxie sans avoir fait deux tonnes d'expériences louches ? Y compris des régressions sous hypnose...
- J'avoue que j'ai pas pensé au problème sous cet angle. Surtout que lui, enfin elle, dit-il en montrant l'elfette, nous a causé pas mal de soucis.
- Ben sachez que je me souviens parfaitement de mes vies antérieures, les gars ! Bon, vous venez chantez avec moi ?
- Euh, vaux mieux éviter, sauf si ton public apprécie Haruko Momoi.
- Vous êtes venus pour quoi, alors ?
- Ben, on vient te proposer une bonne baston contre des ennemis de la Déesse. Ça te dit ?
- Sans problème. Mais d'abord j'insiste pour que vous chantiez un coup ! Faut que j'offre un final inoubliable à mon public ! N'est ce pas !
- Ouiiiiiiiiiiiiiii ! gueula le public.
- Vous voyez ? Allez, pas de timidité mal placée, on chante tous !
- Bon, ben, ils couperont pas à Momoi...
Après avoir récupéré la réincarnation de T-Citron et une fois les fans satisfais (quoiqu'un peu perturbés par l'irruption des sonorités aiguës de Momoi au milieu des graves de mitraillette), le joyeux petit groupe se transporta à l'autre bout de la Galaxie sur une Klaäas II, une planète double dont un des membres était une sympathique planète médiévale. Pour ceux qui se demandent par quels moyen ils voyagent, sachez simplement qu'ils passaient par les limbes, sortant temporairement de notre Univers pour le réintégrer un peu plus loin. Que ce « un peu plus loin » représente une distance de 80 000 années-lumière est une belle preuve que décidément, tout est relatif.
La planète Klaäs III, donc était connue pour être le siège d'une des plus importantes école de la religion Discordianiste. C'était donc un lieu saint et de très nombreux prêtres et prêtresse vivaient ici, en particulier dans une régions de montagnes et de haut plateaux reculés, où des centaines de temples étaient rencontrés à chaque pas. Chacun de ces temples possédait une architecture unique, toujours plus extravagante que celle de son voisin. Il n'y avait bien sur aucune hiérarchie ni organisation, sauf des structures temporaires pour un événement festif, ou juste pour déconner. Tout le monde vivait en harmonie dans un joyeux chaos, ce qui prouvait que tout n'était pas tombé dans la décadence au sein de l'Empire.
- Ça fait du bien de voir ce beau spectacle ! dit Milvus, qui avait ressorti son pendentif érisien.
- Ça me fait penser, dit Calimsha, que je n'ai toujours pas compris comment tu pouvais prier pour une Déesse et bosser pour une autre sans te faire arracher les ailes.
- C'est pourtant très simple. Premièrement, Aphra et Eris ont toujours été bonne copines, Deuxièmement, Aphra a toujours su que je n'avais jamais sérieusement prêté allégeance envers elle. Pourquoi crois-tu qu'on me surnomme l'Hérétique ?
- Quoi ??? Et elle l'accepte ?
- Elle a intérêt ! Elle m'a transformée en Ange sans me demander mon avis, je te rappelle. Je l'ai suivi parce que ça m'amusait et pour pas prendre de risques, mais quand j'ai compris qu'elle s'en fichait, j'en ai profité, c'est tout ! Faut pas oublier que je suis un agnostique forcené. Je ne crois en une Déesse (ou un Dieu...) que si je l'ai rencontré, et je vénère la Déesse que j'ai envie de vénérer !
- Et tu ne vénères pas de Dieu ? demanda Ulyk, curieux.
- Hors de question ! Prier un Dieu en cas de besoin, pourquoi pas. Mais vénérer un vieux barbu, quelle horreur ! Je ne peux vénérer qu'une nana. Mignonne si possible.
- Ah... fit-il, ayant quand même du mal à faire coller le Milvus avec lequel il parlait et celui qu'il avait étudié dans les livres d'histoire.
- Les hommes, tous des pervers, grogna l'elfette.
- Ben tu te souviens pas de ta vie antérieure, demanda White Tea.
- Si justement. Et j'aurais préféré ne pas m'en souvenir ! J'étais une prêtresse du gecko pure et innocente moi ! Je suis salie par ces souvenirs !
- Mais non, mais non... dit White Tea en tentant de la console.
Cependant, à force de discuter, ils étaient arrivés devant le plus grand et le plus ancien temple de la région. Fondé il y a 700 ans par une jeune fille suite à des visions qu'elle avait reçue, il n'avait depuis cessé de s'étendre, absorbant petit à petit ses voisins. Ce qui expliquait son architecture encore plus chaotique. On avait beau essayé de volontairement faire un temple avec un look unique et impossible à comprendre, seul les vieux bâtiments ayant grandis tout seuls pouvaient arriver à ce résultat, authentique mélange parfait et subtile d'ordre et de chaos. C'était le genre de bâtiment à avoir engendré une légion d'architecte au cours des ages, au lieu d'avoir été engendré par un architecte, même dément. Le bâtiment parfait pour abriter les plus hautes sphères de l'Église de la Couette Dissonante.
- Ah oui quand même... fit Calimsha en arrivant. Ça a bien changé ici, en 500 ans !
Les couleurs dominantes était le rose et le bleu pastel. On discernait des colonnes, des piliers, des passages, des tours, des ponts, des murs, des jardins, des bouts d'ailes, mais aucune structure globale. Aucun élément ne semblait aller avec son voisin. Des portrait de jeunes fille loli-moe-couettiques étaient visibles un peu partout.
- C'est encore un des ces trucs hyper-dimensionnels ? demanda Ulyk.
- Non non, y a que trois dimensions dans ce bâtiment. Mais c'est clair qu'on jugerait que les constructeurs ont triché pour ne pas obéir aux lois de la géométrie euclidienne. Et pourtant ce n'est pas le cas. C'est ce qui rend ce temple si exceptionnel.
- Je vois.
Personne ne les arrêta, étant donné qu'ils arrivaient pile à l'heure de la relève entre le service d'ordre et le service de chaos. Ils pénètrent donc au plus profond du temple, dans les jardins personnels de la Grande Sainte Rimone.
- Je vous attendais, fit celle-ci.
C'était une jeune fille aux cheveux bleus, assise en tailleur sur le rebord d'une fontaine. Elle avait l'air d'avoir une douzaine d'année, mais c'était elle qui avait posé la première pierre du temple dans lequel ils se trouvaient.
- Viens-tu avec nous ? demanda Ulyk.
- Bien entendu.
La réincarnation de Pavel quitta donc son temple, et les ChouChouLandais sautèrent de nouveau pour se retrouver sur un yacht rapide, filant au milieu d'un océan.
- On est où ?
- Sur la planète Meurvor, qui est recouverte à 90% d'eau.
- En effet, il y a pas l'air d'avoir beaucoup de terres émerges. Et justement, on va sur quel île ?
- On ne va pas sur une île.
Et en effet, après une heure de trajet, le bateau stoppa et ils enfilèrent tous des tenues de plongées. Puis ils quittèrent le yacht pour plonger dans l'océan. C'était des équipements de haute qualité et ils purent continuer à communiquer par radio.
- Décidément, on va les chercher dans les endroits les plus étranges, nos anciens concitoyens, fit Calimsha.
- Et encore, t'as pas tout vu...
- Je me demande qui on va chercher, dit White Tea
- Vous allez voir...
Ils arrivèrent dans une grande forêt d'algues, à environ 200 mètres de profondeur, et découvrirent en son sein une vaste cité sous-marine faite de corail. De nombreuses lumières éclairaient la ville, ce qui permettait de voir qu'une intense activité y régnait.
- C'est une ville , une race de delphinoïdes. Nous venons chercher l'un des leurs.
- Un ChouChouLandais réincarné en dauphin ? On aura tout vu !
- Et encore, tu ne sais pas qui c'est.
- Je crains le pire.
Continuant à nager, ils arrivèrent devant un bâtiment, qui, de toute évidence, était un Palais des Sports. Quelques ChouChouLandais allèrent regarder les affiches et découvrirent qu'il se déroulait en ce moment en son sein un grand tournoi de catch.
- Du catch pratiqué par des dauphins ? Je suis curieux de voir ça !
Au vu de l'affiche, certains commençaient à avoir des soupçons sur l'identité du ChouChouLandais qu'ils venaient récupérer. Après une suite de couloirs, ils débouchèrent dans une grande arène ou les clameurs d'une foule siffleuse se faisait entendre, mettant à mal leurs tympans.
- Putain, des supporters qui acclament leurs champions avec des ultrasons, ça fait mal aux noreilles !
Ils se mirent les mains sur les oreilles (pas très efficace avec leur équipement de plongée) et observèrent ce qui se passait sur le ring. Deux Syuzwyuzw étaient en plein combat, tortillant leur corps et leurs nageoires dans tous les sens, dans une étrange danse à la fois gracieuse et grotesque.
- En effet, c'est à voir !
- j'aurais jamais pensé que des dauphins puissent faire ce genre de mouvement.
Le combat était particulièrement impressionnant de par sa situation aquatique, qui le rendait encore plus tridimensionnel que du catch normal. Les mouvements d'humains auraient été ralentis sous l'eau, mais avec des Syuzwyuzw, ce n'était pas du tout le cas : leur peau glissait dans l'eau et tout se passait très vite.
Le combat dura encore quelques minutes, puis s'acheva par une victoire écrasante. Les ChouChouLandais se faufilèrent discrètement vers la loge du gagnant. Les vigiles grognèrent quelque peu en voyant arriver une telle troupe, mais Ulyk avaient pour eux des arguments frappants (en petites coupures). Ils les laissèrent alors passer sans histoire. Puis les ChouChouLandais toquèrent à porte du champion, et entrèrent sans attendre de réponse.
- Mais qui êtes-vous ? C'est quoi ce bazar ? fit Xxuywgzu, le champion, en voyant sa loge envahie par une bande de gens à pattes à l'air louche.
- On vient te chercher, le troll ! fit Milvus.
- Quoi ???
- Ça va sûrement te faire tout drôle, expliqua Calimsha, mais dans une vie antérieure, tu étais un Troll de Troy
- Quoi ? Un de ces gros tas de poils puants qui ont peur de l'eau ? Jamais de la vie ! Je suis un Syuzwyuzw et fier de l'être ! Sortez d'ici ou je fais de noeuds avec vos appendices disgracieux !
- Pas de doute, c'est lui, c'est exactement le même sale caractère.
Contrairement aux autres ChouChouLandais, il avait été jugé préférable de ne pas faire remonter tous les souvenirs de sa vie antérieure à Xxuywgzu. Les risques de schizophrénie étaient bien trop importants. Aussi avaient-ils été fortement soulagé de voir le delphinoïde accepter de les suivre pour partir à l'aventure. Visiblement, il avait du mal à trouver des adversaires à sa hauteur et il commençait à s'ennuyer. Ils dégotèrent donc un générateur de champ de force pour lui créer une bulle d'eau environnementale, et se téléportèrent à la destination suivante.
- Encore une planète aquatique ? s'exclama Yleyne. On vient chercher quoi cette fois-ci ? Un poulpoïde.
- Un ChouChouLandais réincarné en Cthulhu ? fit Calimsha. Ce serait une bonne nouvelle.
- Rien d'aussi extravagant, dit Ulyk. On va rester dans la ville, c'est un humain.
En effet, ils ne se trouvaient pas au milieu de l'océan, mais dans une ville portuaire sillonnée par de nombreux canaux. Une brise d'été berçait agréablement les rues, et le soleil déclinait sur l'horizon. Tout était paisible et de nombreux habitants se promenait un peu partout, profitant de cette ambiance relaxante. Des gondoles glissaient silencieusement sur l'eau des canaux, dirigés par de charmantes jeunes filles appelées undines. Se divisant en trois groupes, ils montèrent à bord de trois de ses gondoles touristiques et traversèrent la lagune.
- C'est ici que nous allons, dit Ulyk en désignant un bâtiment à ses compagnons.
- Un restaurant ? Quelle bonne idée ! fit Pavel. On commence à avoir sacrément la dalle à se balader ainsi aux quatre coins de la Galaxie.
- Vous avez un drôle de langage, ne put s'empêcher Yleyne, qui avait subi des années de stricte éducation dans des pensionnats de jeunes filles.
Le maître d'hôtel ne put s'empêcher de tiquer en voyant un groupe aussi hétéroclite rentrer dans l'espace sacro-saint de son domaine. Seul la fine fleur de la société venait ici, et toujours dans leurs plus beau habits. Aussi en voyant arriver une bande d'excité portant des vêtements démodés, provinciaux, sales, voire carrément inacceptables, il songea aussitôt à appeler les gorilles efficaces et incroyablement discrets de l'établissement. Mais quelque chose clochait. Le groupe était trop hétéroclite pour coller au moindre groupe de perturbateur de la planète. De riches excentriques ? Même ceux-là avaient la décence de bien s'habiller pour venir ici. Ou alors ils étaient vraiment très riches. Et dans ce cas-là, il aurait du les reconnaître.
- Une table pour sept ! dit Ulyk.
- Avez-vous réservé ?
- À vous de choisir, dit Calimsha.
- Plaît-il ?
- Il veut dire que c'est à vous de choisir la solution qui vous sera la plus facile, expliqua Milvus. Je vous conseille de retrouver une réservation nous correspondant.
- C'est bien ce dont j'avais peur.
Le maître d'hôtel se résigna donc, tout en effectuant discrètement deux opérations : mettre les vigiles du restaurant en état d'alerte maximale, et alerter la police pour qu'elle se tienne prête. Les ChouChouLandais s'installèrent donc confortablement pour étudier le menu. Deux heures plus tard, ils avaient vidé la moitié des réserves du restaurant, aussi bien en nourriture qu'en boissons, et leur note avait explosé le précédent record établi il y a deux cent ans par l'excentrique Archiprincesse de la Motte du Cul de Cheval. Mais l'heure délicate du paiement ne cesser d'approcher, et le maître d'hôtel ne cessait de se ronger les ongles d'anxiété. Ils avaient mangé voracement et avec des manières barbares, mais n'avaient pas causé de scandale. La rumeur courrait que le célèbre chanteur White-Tea faisait partie du groupe, et du coup, aucun client n'avait protesté de cette intrusion. La plupart avaient même sembler s'en amuser.
Un des excentriques, celui qui avait un faux sabre de technomage à la ceinture, lui fit soudain signe d'approcher.
- Avant de payer... commença-t-il.
Le coeur du maître d'hôtel cessa de battre.
- ...nous voudrions féliciter le chef.
Péniblement, le sang se remit à circuler dans ses veines. Il essaya désespérément de garder son sang-froid, mais plus la soirée avançait, et plus il avait du mal à situer les inconnus.
- Mais bien entendu, je vais l'avertir.
Et la démarche raide, il se dirigea vers les cuisines. Il en revint suivi d'un colosse dont la toque touchait presque le plafond.
- Il n'a pas l'air de se souvenir de ses vies antérieures. Comment on va faire avec lui ? demanda tout bas White-Tea.
- Pas de problème, avec lui ce sera très simple. Il suffit de trouver le bon mot-clé.
Et une fois le chef arrivé à proximité, après de vives félicitations, Milvus prononça à mi-voix les mots suivant :
- Melon-bago.
Après avoir quitté le restaurant (en payant, ce qui avait surpris le maître d'hôtel), mais en embarquant le chef (ce qui l'avait encore plus surpris), les ChouChouLandais désormais de plus en plus nombreux firent un nouveau saut qui les amenèrent dans les jungles du Royaume du Mur de Fleur. La végétation était touffue, le rayons du soleil arrivaient à peine au niveau du sol, et le danger semblaient guetter à chaque pas.
- On aura vraiment tout vu, rouspétait Yleyne. Ce n'est pas un endroit où amener une jeune fille ! Je me demande bien qui on vient chercher ici. Ou quoi...
- Vous allez voir, firent Ulyk et Milvus, qui, depuis le début de cette petite épopée, étaient les seuls à avoir la fameuse liste.
Marchant rapidement, ils s'engagèrent dans une section encore plus touffue, ou des lianes pendaient de toutes parts. Sans prévenir, ils arrivèrent enfin dans une vase clairière dans laquelle un grand nombre de créatures de toute origine et de toute espèce étaient disposé en cercle autour de deux orateurs. Malgré la grande diversité des auditeurs, le groupe le plus nombreux était sans conteste celui des natifs de cette planète. Minces et verts, ils déployaient leurs tiges et leurs feuilles au soleil, profitant de l'absence d'arbre au dessus de leur tête.
- Je rêve ou ce sont des plantes intelligentes ? siffla Xxuywgzu.
- Ce sont des Floraux ! Bien sur que ce sont des plantes ! fit Yleyne. Même en dauphin tu reste une brute sans cervelle à ce que je vois.
- Xuttyurwym ! Je vais te noyer !
- Silence, imbéciles ! C'est un lieu saint, ici ! ordonna Milvus.
Tout le monde s'assit au milieu des autres auditeurs et écoutèrent le discours des deux orateurs. C'était un couple de philosophes fort respectés, qui étaient en train de tenir un discours sur l'importance de la nature et de l'harmonie entre les espèces, quelles qu'elle soient. Au bout de deux heures, la moitié des ChouChouLandais buvait leurs paroles et l'autre ronflait.
Une fois le discours terminé, la moitié des ChouChouLandais qui ne dormait pas s'approcha des orateurs, laissant les autres à leurs rêves. Ils purent alors les observer un peu mieux. Malgré leur origine végétale, les Floraux était capable de bouger, et pouvait même manger des aliments, étant en partie des plantes carnivores. De grandes coupelles oranges leur permettaient d'attraper leurs proies et de les digérer. Normalement assez lents, ils disposaient cependant de mécanismes cellulaires leur permettant d'effectuer des mouvements brusques, très rapides, mais courts, aussi bien pour se défendre que pour attraper une proie. En outre, ils étaient sur une sorte de petit chariot motorisé pour se déplacer.
- Nobles philosophes, acceptez-vous de nous accompagner dans notre quête ?
- Nos souvenirs remonte plus loin que nul Floral dans cet univers. Nous ne pouvons rester immobiles devant la menace qui plane sur les êtres d'ici et d'autour. Nous ne sommes pas fait pour voyager de parmi les étoiles, mais pour apprendre et faire apprendre Le choix déchire notre être, mais la voix vraie est la plus difficile et nous nous plions à ce fait.
- Hein ? fit White Tea. C'est quoi cette façon de parler ?
- C'est le style des philosophes du Royaume du Mur de Fleur, expliqua Milvus. Il disent qu'ils se souviennent de de leurs vies antérieurs et qu'ils vont venir avec nous, même si une telle quête n'est pas faite pour un Floral.
- Parfait, dit Ulyk. En ce cas, je vais vous rendre ce qui vous appartient de droit.
Et il sortit d'une de ses poches un artefact rond, aux couleurs brillantes, d'environ dix centimètres de diamètre. Il le tendit à une de créatures qui l'accepta avec reconnaissance, et le passa à une de ces tiges.
- Le ChouChou Suprême est de nouveau porté par le chef des ChouChouLandais. Aujourd'hui est un jour qui fera date dans l'histoire galactique.
Malgré tous leur calme et leur dignité de philosophes, ChouChouBoy et Chen Li avaient été quelque peu vexés de voir qu'ils n'étaient pas les premiers ChouChouLandais contactés. Milvus et Ulyk eurent beau essayer de leur faire comprendre qu'en tant que plantes, ils étaient trop vulnérables, qu'ils avaient préféré regrouper une équipe assez nombreuse avant de passer les prendre, ils n'en démordaient pas. L'ambiance était donc un peu tendu au sein de la normalement joyeuse équipe, quand ils arrivèrent devant le Palais de Sernnaga. Situé au milieu de la plus grande ville de la planète Syrma, considéré comme un des plus beaux bâtiments du secteur de Sirius, vieux de plus de 2000 ans, perpétuellement agrandi depuis lors, c'était une véritable ville dans la ville ou mêmes les habitués se perdaient de temps à autre.
Les ChouChouLandais, par souci de discrétion, avaient utilisés la plus petite des entrées de service du Palais, ce qui ne les empêcha pas de se faire cueillir par une demi-douzaine de gardes.
- Vous êtes qui vous ? Des manifestants ? Z'avez rien à faire ici ! Dégagez !
- On fonce dans le tas ? proposa White-Tea.
- Bien sur que non ! dit Ulyk.
Et il tendit sa main pour être identifiés par les gardes. Ces derniers, surpris et sceptiques, l'acceptèrent quand même. Leur expression changea pour de la stupéfaction quand leur tricordeur, après avoir analysé l'ADN d'Ulyk et les fluctuations quantiques de son cerveau, se colora d'icônes vertes et bipa joyeusement.
- Ceci est une mission spéciale. Je ne suis pas passé ici, et mes amis non plus.
- À vos ordres ! firent les gardes en se mettant au grade à vous.
La petite troupe les dépassa donc pour sortir de la petite annexe où ils se trouvaient et traverser les jardins du Palais.
- Là, j'aurais besoin d'une petite explication, dit White Tea...
- C'est très simple, dit Ulyk. Les habitants de Sernnaga aiment être prévoyants. Les accréditations des Chevaliers Célestes ne sont annulés qu'en cas de trahison (ce qui est fort rare) ou de changement d'affectation (ce qui est beaucoup moins rare), mais pas en cas de décès.
- Vous avez donc été en service ici.
- Oui, c'est même dans l'enceinte de ce Palais que je suis mort. Vous m'excuserez d'ailleurs si on fait un détour pour éviter l'emplacement de cet événement. Ce n'est pas un souvenir très gai, surtout que je suis loin d'avoir été le seul à mourir ce jour-là.
- Ah d'accord... Vous êtes cet Ulyk.
- Oui.
- Je comprends mieux deux trois trucs.
Vingt minutes plus tard, après avoir traversé une dizaine de jardins de style différent et presque autant de bâtiments tous plus anciens et prestigieux, ils arrivaient enfin devant une grande serre contenant des plantes tropicales. Ils y entrèrent et virent qu'outre les grandes plantes tropicales géantes, de nombreuses fleurs de taille plus modestes étaient disposées ici et là. En particulier autour d'un petit espace surélevé dans lequel se trouvait un table en fer forgé, visiblement l'endroit parfait pour prendre le thé avec des petits gâteaux.
- Tenez-vous bien ! On ne vient pas chercher n'importe qui.
- Bhaa si c'est un ChouChouLandais, on s'en fiche un peu...
- Chuut !
- Une jeune femme était en train d'arroser les fleurs devant eux. Elle était d'une très grande beauté et son maintien aristocratique ne laissait aucun doute sur le fait qu'elle était née au sein d'une lignée prestigieuse.
- Votre Altesse, fit Ulyk, en mettant un genou à terre devant elle, tandis que les autres restaient en retrait.
- Ah, vous voilà.
- Vous savez qui nous sommes ?
- Oui, et je sais aussi qui je suis. Je ne puis négliger mon devoir, aussi depuis que j'ai pris conscience de mon héritage, me suis-je préparé à ce jour.
- Votre Altesse, voilà qui me comble de joie.
Et c'est ainsi que la Princesse Kiko, fille du Duc-Gouverneur Landdinion XXII de Syrma, rejoignit la joyeuse bande des ChouChouLandais.
Ce fut avec un certain regret que la petite équipe quitta le décor agréable du Palais pour l'étape suivante de leur voyage. En effet, loin du faste et de la beauté de la haute société de Syrma, ils se trouvaient désormais dans un quartier industriel bien peu hospitalier : désert, à moitié en ruines, et de surcroit fort humide en raison de la proximité de la mer. Visiblement, l'endroit avait connu une période de prospérité, mais celle-ci s'était achevé il y a bien longtemps.
- On va marcher longtemps ? protesta quelqu'un. Pourquoi on se rematérialise jamais à notre destination exacte.
- La Déesse l'a interdit pour qu'on fasse de l'exercice, expliqua Ulyk.
- N'importe quoi... dit Calimsha.
- Bhaa... On est presque arrivés.
Avisant un hangar indiscernable de ses voisins, Milvus s'arrêta devant et dit à tout le monde :
- C'est ici. Quelqu'un a la clé ?
Tous les ChouChouLandais se regardèrent, quelque peu perplexes.
- Aucun de nous ne connaît cet endroit. En avoir la clé serait hautement improbable, dit ChouChouBoy.
- C'était juste au cas où...
Et sans hésiter, il dégaina son sabre pour découper proprement la petite porte située à droite du grand portail principal. La petite troupe s'engagea en tâtonnant dans le noir absolu du hangar.
- Y a pas de lumière ?
- On peut arranger ça, dit Calimsha.
Une rapide incantation murmurée, et une boule lumineuse apparu au bout de ses doigts. Il la lâcha et elle alla flotter à quelques dizaines de centimètres au dessus des ChouChouLandais.
- Ah merci.
Traversant le hangar, ils arrivèrent devant un escalier qui plongeait vers le sous-sol.
- On va par là ? demanda White Tea. Décidément, c'est de plus en plus louche. On va chercher qui ?
- Pas qui, mais quoi, répondit Ulyk. Tous les ChouChouLandais localisés sont déjà ici.
- À l'exception de Tsu et Soso qui sont en mission de leur côté et nous rejoindrons en temps nécessaire, ajouta Milvus.
- Mouais, tout ceci ne me dit pas où on va...
- Patience, patience... On est presque arrivés.
Mais malgré les paroles rassurantes de Milvus et Ulyk, ce fut des kilomètres de couloirs et d'escaliers qu'il durent emprunter avant d'arriver enfin dans une vaste salle au sol de terre battue. Au milieu de la salle, recouverte d'une fine couche de terre et de poussière mêlées se trouvait ce qui ressemblait fortement à une écoutille.
- On doit rentrer là dedans ?
- Oui. Mais ne vous inquiétez pas, vous allez vite comprendre.
Malgré ces paroles rassurantes, ce fut définitivement en maugréant que la petite troupe descendit à travers l'écoutille. Il faisait noir comme dans un four, et nombreux furent ceux qui jurèrent après s'être cognés contre quelque chose ou quelqu'un.
- Vous êtes tous là ? C'est bon ?
- Oui.
- OK. Fermez l'écoutille, on va démarrer.
- Démarrer ?
Une console informatique s'illumina soudain et les ChouChouLandais comprirent enfin où ils étaient.
- Il était donc là... fit White Tea. Je me disait bien que je reconnaissait le style de cette écoutille.
- Bon, puisque vous avez compris ce qu'on faisait ici, ne perdons pas de temps. Tous à vos postes !
- Huhu, je sens que les gens au-dessus vont pas se marrer.
Le sol se mit à trembler de façon très progressive. Les rares habitants de la zone industrielle le remarquèrent seulement au bout d'un moment. Certains eurent la présence d'esprit de prendre leurs jambes à leur cou. D'autres, plus téméraires, voulurent allez voir d'où provenait ses tremblements. Mal leur en prit. Les vibrations ne firent que s'intensifier, et à partir d'un moment, il devint difficile de tenir debout. Puis le sol se fissura, explosa, se déroba sous eux : toute la zone portuaire était en train de s'effondrer sur elle-même. Bref, tout était perdu pour eux, et, tandis qu'ils sombraient dans les profondeurs de la terre, leur dernière vision fut pour un immense vaisseau de métal qui émergeait du sol pour s'envoler lentement vers l'espace.
L'USS Yggdrasil venait de se réveiller, après un long sommeil.
Une fois leur fier vaisseau récupéré, les ChouChouLandais mirent le cap vers le Grand Nuage de Magellan, ou les rares embryons de résistance à l'envahisseur étaient en train de se rassembler. Le vaisseau était en parfait état malgré les centaines d'années passées caché sous terre. Il fallait rendre hommage à la qualité exceptionnelle de sa technologie de classe V. Il y avait certes une belle couche de poussière quand ils étaient arrivés, mais elle avait déjà disparu, aspiré par les nombreux systèmes de nettoyages. Les ChouChouLandais avaient vite repris leurs bonnes vielles habitudes et avaient donc investi un des bars de la Promenade, que White Tea s'était fait un plaisir de rouvrir.
- Ah, ça fait plaisir de se retrouver tous ici ! tonna Farf.
- Ouais, même si on a un peu changé, ajouta Hébus le dauphin.
- Un peu... T'as le don de la litote, toi, ricana White Tea.
Ils passaient donc le temps dans la bonne humeur, se remémorant le bon vieux temps tout en vidant les réserves d'alcool du vaisseau (qui étaient devenues quelque peu exceptionnelles vu leur age). Mais ce moment de détente ne put durer bien longtemps. Sans prévenir, l'alerte rouge se mit à retentir dans tous les recoins de l'USS Yggdrasil.
- Et merde ! Quoi encore ?
Ils découvrirent bien vite que le vaisseau était sorti sans prévenir de l'hyperespace. Et surtout, il était entouré d'une douzaine de vaisseaux de toute taille qui avaient sans l'ombre d'un doute pris une formation d'encerclement.
-D'où ils sortent ? rouspétait Calimsha. On est en plein dans le vide entre les deux galaxies, y a pas de systèmes à moins de 50 000 années-lumière.
- Ben ça veut juste dire que nous avons affaire à des adversaires très bien renseignés, et sacrément motivés pour nous courir après.
- On reçoit une transmission, fit Chen Li.
- Nous sommes la flotte des Mercenaires Libres Dendariis. Nos intentions ne sont pas hostiles. Notre leader souhaite vous rencontrer.
- En voilà une drôle de manière de demander un entretien, dit Pavel. Je ne pense pas qu'il faille leur faire confiance.
Mais Milvus avait sourit en entendant le nom des mercenaires, et surprit tout le monde lorsqu'il prit la parole :
- Pas de problèmes. C'est une surprise, mais ce n'est pas un ennemi.
- Nous vous proposons de venir le rencontrer à bord de notre vaisseau amiral.
Une petite délégation se forma donc et alla prendre une des navettes du vaisseau pour rejoindre le fameux leader de la flotte mercenaire.
- Comment se fait-il qu'il existe une telle flotte de mercenaires dans une galaxie en paix depuis des siècles ? demanda quelqu'un.
- Il ne faut pas perdre de vue la taille impensable de notre Galaxie, expliqua Ulyk. Certes, elle est unifiée et n'a pas connu de réels conflits majeurs depuis grosso-modo l'époque ou je me suis fait exploser la tronche. Mais ça n'empêche pas que c'est une entité constituée de milliers de groupes pouvant développer des conflits ethniques, culturels, politiques, voire même religieux. Ce n'est pas évident d'éviter de tels conflits dans un Empire avec une structure avant tout fédérale, et sans centralisation forte. À mon avis, ils ont l'embarras du choix quand il s'agit de se trouver un employeur.
- Je vois...
- Mais le point le plus intéressant pour nous, c'est que cette flotte existe depuis plusieurs siècles et n'a jamais changé de chef. La rumeur dit qu'il serait immortel.
- Huhu...
- En effet, ça doit cacher quelque chose.
Après un trajet rapide, ils accostèrent un vaisseau un peu plus grand que les autres. Sa coque était zébré de nombreuses balafres, la plupart d'entre elles réparées et donc quasiment invisible. Mais on ne pouvait cacher ce genre de détails aux ChouChouLandais. Avec divers sifflements et quelques jets de vapeur, la navette se posa dans la petite soute du vaisseau mercenaire. Les ChouChouLandais en sortirent, dans le désordre le plus total, comme à leur habitude. Il furent accueillis par un petit groupe de mercenaires en uniforme gris.
- Suivez-vous, s'ils vous plaît. Nous allons vous amener à la passerelle.
- Comme vous voulez.
Les ChouChouLandais suivirent docilement leurs hôtes, non sans noter leur nombre, leurs armements et la configuration des lieux. En cas de problème, il était hors de question se retrouver sans défense au milieu de l'ennemi.
Après un trajet labyrinthique dans les entrailles du vaisseau, ils arrivèrent enfin dans une passerelle de taille moyenne, bourrée d'écrans et hologrammes tactiques. Juché au milieu de tout ces équipement à l'allure impressionnante se trouvaient un être de petite taille, mais au sourire inquiétant. Il prit la parole :
- Je vous souhaites la bienvenue au sein de ma modeste armada.
- C'est un honneur, répondit Milvus. Comment devons-vous vous appeler ?
- Vous pouvez m'appeler Amiral Kaittchimth, répondit-il, saisissant la perche lancé par Milvus.
Comportant désormais un ChouChouLandais de plus et accompagné d'une véritable petite flottille de vaisseaux, l'USS Yggdrasil reprit sa route vers le Grand Nuage de Magellan. Aucun autre invité surprise ne surgit du bas-coté, et il arrivèrent sans encombre à leur destination. Le vaisseau quitta l'hyperespace dans un système binaire, non loin d'une géante gazeuse dotée de son cortège d'anneaux.
- La flotte alliée est sur nos senseurs. Alignement de notre vitesse relative sur la leur.
En quelques minute, le vaisseau effectua les manoeuvres d'approche et rejoignit sa place au sein de l'ultime rempart de la civilisation galactique contre le terrible envahisseur venue la détruire.
- Et bé... fit Yleyne, alias Ori l'elfette sans mâcher ses mots. Si c'est ça notre flotte alliée, on n'est pas sortis de l'auberge, moi je vous dit !
En effet, la flotte méritait à peine son nom : ce n'était qu'un amas de vieux vaisseaux de guerre rafistolés et de surplus de l'armée. Il n'y avait strictement aucun ordre dans la flotte, comme si leurs équipages avaient suivi leur entraînement militaire par correspondance. De nombreux vaisseaux semblaient carrément hors d'usage et ne restaient avec la flotte que parce qu'ils étaient tractés par un ou plusieurs de leurs collègues.
- C'est avec ça qu'on doit se débrouiller ? grogna Calimsha. Si j'avais su, je serais resté dans ma librairie. Même les Dendariis, à vingt contre un avec leur mini flotte spécialisée, pourraient anéantir cet amas de poubelles sans problème.
- Ne soit pas médisant, fit un nouveau venu.
C'était Tsunami, accompagné de Soso, qui venaient de se matérialiser sur la passerelle de l'USS Yggdrasil.
- Nous avons travaillé dur pour rassembler la fine fleur des admirateurs de la Déesse désirant se battre pour elle !
- Mouais... Dit plutôt que t'a rassemblé une bande de bras cassée constituée d'ados attardés fans de tout ce qui est militaire, et de vétérans gâteaux.
- Merde, comment t'as deviné ?
- ...
- Ne soyez pas négatif comme ça, intervint Milvus. Nous avons une réunion à faire.
- Une réunion ? Pour une Guerre Sainte ? Je vois qu'on ne perd pas les habitudes.
Les leaders de la résistance montèrent donc à bord de l'USS Yggdrasil pour participer à la fameuse réunion. Le vaisseau disposait en effet d'une grand salle polyvalente qui pouvait entre autre servir de cinéma, de théâtre, de salle de concert...
- Bon, on commence bientôt, demanda Xxuywgzu. J'en ai marre d'attendre.
- Une seconde, dit Ulyk. Le vidéo-projecteur a du mal à marcher. Il ne veut pas afficher l'image de l'ordi.
- 1000 ans de progrès technique, une technologie de classe V, et on en est encore là ! grogna Milvus. C'est vraiment n'importe quoi.
- Bhaa... fit Calimsha. Laissez moi faire.
Il brandit son bâton de mage, fit comme s'il allait jeter un sort, mais surprit tout le monde en tapant sur l'ordinateur avec.
- Mais ça va pas la tête ? hurla Tsunami.
- Ben quoi ? Ça marche maintenant.
En effet, le vidéo-projecteur affichait désormais une image parfaite, visible de toute la salle.
- Pourquoi ne suis-je même pas surpris ?
La réunion commença donc, bon gré mal gré, et l'assemblée de vieux crétins et de jeunes cons semblait boire les paroles des ChouChouLandais. Mais dès qu'on demandait à l'un d'entre eux de prendre la parole pour donner son avis, faire un commentaire, ou même pour donner des informations sur les vaisseaux qu'ils commandaient, ils devenaient soit tout rouge (les jeunes), soit au bord de la crise cardiaque (les vieux).
- Mais qu'est ce qu'ils ont tous, à la fin ? demanda Milvus. C'est fatigant.
- Je crois qu'il nous considèrent un peu comme des dieux vivants, répondit Tsunami. Du coup l'émotion leur fait perdre tous leurs moyens.
- Mais c'est pas vrai ! Mais quelle bande de bras cassés ! rouspéta Milvus.
- C'est pas comme si on n'avait pas l'habitude, dit Yleyne. Ce serait plutôt si on avait eu des gens compétents sous nos ordres qu'on aurait pas su quoi faire...
- Merci de ces encouragements. Ça fait vraiment plaisir !
Cependant, à force d'obstination, ils réussirent à avoir un panorama fiable des forces dont ils disposaient et avaient peu à peu déterminé quelle stratégie employer pour reconquérir les territoires perdus. C'était bien sûr l'Amiral Kaittchimth qui s'était chargé de superviser de derniers points. Sa grande expérience acquise avec sa flotte de mercenaire le désignait tout naturellement pour cette tâche et il s'en acquitta de avec professionnalisme.
- Tout ceci peut sembler un peu complexe, mais étant donné notre désavantage en terme de nombre et de puissance de feu, nous n'avons pas le choix. Il va falloir faire appel de façon intensive à la ruse et à la tromperie si on veut les vaincre.
- La ruse ? fit Xxuywgzu. C'est pour les lâches, ça !
- La ferme, le poisson !
- Je suis un delphinoïde, crétin ! Un mammifère ! Si tu n'es même pas capable de savoir ça, je ne sais pas comment tu peux nous mener à la victoire.
- En tout cas, c'est pas un catcheur qui pourra le faire ! Avec toi, on aurait perdu avant même de voir l'ennemi !
- Répètes-ça si tu l'ose ?
Et il commencèrent à se taper dessus, sous l'oeil affligé des autres ChouChouLandais.
- Mais c'est pas vrai... Même au bout de mille ans, ils se tapent toujours dessus à la moindre occasion.
- Bhaaa... Shigata ga nai... Le pire c'est que je crois que bien loin de faire baisser leur efficacité, ça la fait augmenter...
- Pourquoi ne suis-je même pas étonné ?
Cependant, une décharge d'énergie magique apparut sans prévenir dans un coin de la salle, et tous les ChouChouLandais sensibles à la magie se retournèrent. Ils se préparèrent à se défendre, quelque soit la chose qui allait apparaître, ami ou ennemi.
- Y a des magiciens parmi les envahisseurs de l'autre Galaxie ?
- À priori non, c'est pas de la magie divine là, dit Calimsha.
- Et ?
- Ils transforment tout ce qui ose faire autre chose que de la magie divine dûment autorisé en gros paquet de viande cuite au feu de bois. Suis un peu !
- Ah oui quand même...
Les tourbillons d'énergie magique se dissipèrent peu à peu, révélant peu à peu une forme indistincte mais visiblement humaine, ou tout du moins approchant.
- Il n'a pas l'air menaçant... commença Pavel.
Mais sans prévenir, une toute petite silhouette surgit soudain à une vitesse inhumaine, se dirigeant droit sur White-Tea comme une larve Alien sur sa proie.
- Merde ! Quoi que ce soit, dézinguez-le !
Et une demi-douzaine de sortilèges furent lancé vers l'intrus (et vers White-Tea en même temps, hélas) qui fut proprement carbonisé.
- Tirez pas, bande de cons, c'est nous ! fit la silhouette humanoïde, qui était resté dans le cercle magique.
Reconnaissant la voix, ils comprirent vite que celui qui qui avait parlé était Phoenix-co.
- Merde, on a tiré sur quoi alors ?
- Puuuuuu puuu... fit une pauvre petite voix plaintive.
- Oh merde, le moko !
- Il est complètement grillé. Un vrai marshmallow au barbecue...
- Ça lui apprendra aussi, à surgir de nul part.
Ils emmenèrent Mokona à l'infirmerie, et pendant ce temps-là, Phoenix-co expliqua que la créature pelucheuse avait débarqué à l'improviste tandis qu'il se préparait à rejoindre les ChouChouLandais.
- Il semblerait que ses pouvoirs de téléportation ait des limites. C'est pour ça qu'il est venu chez moi pour faire de l'auto-stop.
- Je vois...
- Mais bon, Trève de plaisanteries. Je ne suis pas venu ici par hasard, mais bien pour faire des affaires avec vous.
- Des affaires ?
- Oui. Je suis venu pour vous vendre des armes. Et au vu de votre flotte, je pense plus que jamais avoir raison. En dehors de ce vaisseau et de la flotte Dendarii, vous n'avez pas un seul vaisseau qui vaille le coût.
- Ne me dis pas que tu as toute une flotte à nous vendre.
- Ah mais ne vous en faites pas. J'ai un large catalogue et tout est à la carte.
Tout en disant cela, il sortit une épaisse liasse de prospectus de son manteau et commença à les déplier pour faire sa démonstration.
- J'ai en rayon une cinquantaine de classes de vaisseau, de la mini-navette au super-strato-croiseur de guerre lourd, en passant par tous les types possibles de vaisseau spécialisé. Chaque classe de vaisseau vient avec son équipement de série et de nombreuses options pour le customiser selon vos besoins. En plus des vaisseaux, j'ai bien entendu un large choix d'armes et de munitions, de toute puissance et de toute nature, du poignard au missile furtif technomagique ! Bien entendu, tout ceci vient avec une garantie de cinq ans minimum, une asssurance en cas de vol et des facilités de paiement...
Il semblait impossible à arrêter, aussi les ChouChouLandais se contentèrent de prendre des notes tout en se demandant si la Déesse, quand elle avait parlé de leur donner « carte blanche », incluait aussi le budget : le catalogue de Phoenix-co était diablement tentant. Cependant il furent interrompus par le retour de Mokona.
- Puuuu !
- Déjà guéri, toi ?
- Puu ! Oui, c'est une de mes 108 techniques : la guérison instantanée ! Pu pu puuuu !
- C'est costaud un Mokona, fit Phoenix-co en ricanant. Je devrais peut-être prendre un échantillon pour mes recherches !
- Puuu ! Milvus protège moi !
Et Mokona alla se cacher derrière Milvus, faussement terrorisé.
- Arrête de déconner, je sais très bien que ça fait des siècles que tu l'as déjà fait.
- Si on ne peut même plus rigoler...
Les ChouChouLandais qui était allé à l'infirmerie repartirent pour revenir sur la passerelle. Là, ils eurent la surprise de découvrir que les réincarnations végétales de ChouChouBoy et Chen Li avait pris les choses en main et dirigeaient les manoeuvres d'entérinement de la petite flotte disparate et hétéroclite. Et ils s'en sortaient très bien.
- J'croyais que vous étiez des êtres pacifiques, fit White Tea. Des philosophes style « je tue pas mon prochain »?. Comment ça se fait que vous dirigiez une flotte militaire ?
- La mort du prochain n'est qu'une transition. Nous ne faisons qu'accélérer le destin inéluctable quand nous volons à autrui son essence. L'accélération n'en est pas moins quelque chose d'horrible. Mais les envahisseurs qui arrivent pour nous voler nos régions ne sont pas autrui. Des barbares hérétiques ne sont pas autrui. L'accélération des impies de l'autre galaxie n'est pas l'accélération d'autrui.
- Gué ?
- Il dit, je pense, que tuer les envahisseurs hérétiques n'est pas grave, expliqua Kaittchsmith. C'est un principe vieux comme le monde. Tuer c'est mal, sauf quand c'est un étranger.
- Ah d'accord... Un peu déçu par ces pacifistes, moi...
- Faut croire que ça existe pas les vrai pacifistes... ajouta Calimsha avec un air cynique. Ou alors ils sont tous morts.
Les vaisseaux sous les ordres des ChouChouLandais apprenaient donc à peu à manoeuvrer ensemble sans se rentrer dedans et à s'aligner sur la même direction. Encore quelques heures et on allait pouvoir leur apprendre à tirer sans atteindre un vaisseau ami.
- Tout ceci s'annonce fort bien, ma foi, dit Milvus avec un large sourire.
Mais au moment précis où il prononçait ses mot bourrés à ras bord d'autosatisfaction, l'enfer se déchaîna sans prévenir.
Une douzaine de vaisseaux venaient de surgir au milieu de la formation alliée, après être sortis de l'hyperespace avec une précision remarquable. En quelques secondes ils avaient ouverte le feu et faisaient exploser l'un après l'autre les vaisseaux de la petite flotte. C'était un véritable massacre, les boucliers des vaisseaux attaqués n'étant apparemment d'aucun secours contre les rayons de la mort ennemis.
- Qu'est ce qui se passe ? demanda frénétiquement Milvus. Pourquoi leurs armes traversent-elles nos boucliers comme du beurre.
- Configuration énergétique inconnue. Nos senseurs n'arrivent pas à déterminer la nature de leurs armes.
- Le bouclier de l'USS Yggdrasil lui-même est inopérant face à ces armes. La coque en alliage bénie semble tenir le coup, mais ça ne durera pas éternellement.
- Et merde... Il manquait plus que ça... Et la flotte Dendarii ?
- Deux vaisseaux endommagés, informa Kaittchsmith. Nos boucliers ne sont pas plus efficaces et notre coque n'est pas aussi performante que celle de ce vaisseau. Pour le moment, ils arrivent à manoeuvrer assez vite pour que l'ennemi n'arrive pas à verrouiller une cible. On devrait pouvoir lancer une contre-attaque dans quelques instants.
- Parfait. USS Yggdrasil, en avant toute, cap sur l'ennemi. Il faut plonger dans leur formation pour les désorganiser.
- À vos ordres !
Le vaisseau ChouChouLandais adopta donc une intrépide trajectoire qui le plaça au coeur de l'ennemi. Toutes ses batteries se déployèrent pour pointer sur les envahisseurs.
- Feu à volonté !
- Les boucliers ennemis résistent, seul 20% de nos attaques font mouche.
- Ce n'est pas si mauvais... dit ChouChouBoy en grinçant des feuilles. Continuez !
- Flotte alliée à 95% ! Il ne reste plus que nous et les Dendariis !
- Et merde ! tonna Milvus. Ça ne peut pas durer ! Il faut les attaquer au coeur de leurs forteresses !
- Qu'est ce que tu proposes ? demanda Calimsha.
- On va leur montrer la supériorité de notre Magie. Je propose que nous nous téléportions par magie directement sur leurs vaisseaux. On les aura au corps à corps.
- Hahaha ! Bonne idée, dit Ulyk. J'ai hâte de voir si leurs fameux Paladins Sacrés peuvent être à la hauteur face à un authentique Chevalier Céleste. Ils vont vite déchanter s'ils pensent que ceux qu'ils ont affrontés dans le petit Nuage de Magellan étaient dignes de ce titre.
- Tu exagères, je suis sûr qu'il n'y avait pas que des chevaliers décadents là-bas.
- Probablement, mais ce n'étaient que des exceptions.
- Le problème, c'est que tu es tout seul ici, dit Calimsha. Donc t'es une exception...
- Ah mais tu fais chier tu sais ?
- On me le dit souvent.
- Hé oh ! C'est pas le moment de se taper dessus entre nous.
- Je viens de repérer leur vaisseau amiral, annonça Chen Li. Je propose qu'on concentrer noter attaque là-bas.
- Farpaitement d'accord, dit Farf. Vu le déséquilibre numérique, il faut frapper fort très vite.
Geratho Gol, Paladin Sacré de niveau 20, leader de la dixième flotte d'invasion, savourait déjà sa victoire programmé. Avec sa force de frappe, forte de 500 vaisseaux interstellaires, 20 000 Paladins Sacrés et une quantité innombrable de Soldats du Dogme, il était sur de lui et de l'invincibilité de sa flotte. Aussi n'avait-il pas hésiter à se moquer des craintes injustifiées de son second à propos des quelques vaisseaux qui réussissaient à leur échapper où à encaisser leur tirs.
- Regarde, certes, ils sont certes un peu plus résistants, mais ils ne contre-attaquent pas. Ce sont des lâches et des faibles, comme les autres.
Son second s'apprêtait à protester, de plus en plus convaincu de l'aveuglement de son supérieur, quand une douzaine d'individus bon identifiés apparurent comme sortis de nul part sur l'immense passerelle de commandement.
- C'est quoi ça ? fit-il.
- La contre-attaque, j'en ai bien peur, fit le second, en portant la main à son arme.
- Impossible ! Paladins ! Soldats ! Emparez-vous d'eux !
Tout ce petit monde s'empressa d'obéir, motivé à la fois par la haine fanatique qu'ils éprouvaient envers ces barbares qui osaient utiliser de la magie non-divine pour souiller le sol de leur vaisseau, et par la perspective d'une bonne récompense. Ils formèrent un cercle autour des ChouChouLandais, prêts à les massacrer.
- Rendez-vous, bande d'infidèle, et votre mort sera un peu moins douloureuse, cria Geratho Gol.
Les Paladins Sacrés étaient assez impressionnants, dans leurs uniformes chamarrés et impeccablement coupés, avec leur épées à la garde richement décoré, et leurs regards de tueurs psychopathes et fanatiques. Les Soldats du Dogme, eux, semblaient être des clones tant ils se ressemblaient les uns les autres. Face à eux, les ChouChouLandais détonnaient fortement. Aucun n'avait d'uniforme, la plupart des vêtements d'un goût particulier, et certains n'avaient même rien sur eux. Mais ils n'en arboraient pas moins des armes impressionnantes et fort variées, ainsi que des yeux encore plus inquiétant que ceux des Paladins Sacrés. Les yeux d'un chat qui se trouve nez à nez avec une souris mythomane et suicidaire.
- Yub yub ! fit Kaittchsmith en contemplant ses adversaires. On dirait qu'on va bien s'amuser.
- Ouais, mais j'ai peur qu'ils ne soient pas assez nombreux, ajouta Farf.
- Ne vous inquiétez pas. La baston ne fait que commencer !